Comment j'en suis venue à lire ce livre, je me sens le besoin de le justifier car quand j'en parle autour de moi, j'entends : "ce n'est pas pour moi, c'est horrible !" Comme si je lisais ce livre parce que j'étais sans coeur ou par pur voyeurisme.
Alors évidemment le sujet est terrible : un couple perd ses deux filles dans un incendie. Anne-Marie Revol écrit donc des lettres à ses deux filles pour continuer avoir un lien avec elles. Les lettres commencent peu avant l'annonce de leur mort et pendant plus d'un an. Elle évoque tout ce qui la lie à ses filles, comment ses filles lui donnent la force de continuer à vivre malgré les difficultés, les doutes, l'espoir et le désespoir.
Certes c'est un sujet que beaucoup ne veulent entendre, je peux le comprendre. Mais ce livre est avant tout un livre d'amour. D'une part, cet amour transparaît à travers l'écriture très belle. Il y a beaucoup de poésie dans ce livre, c'est très joli les petites adresses à ses filles : "mes douceurs de vivre, mes chouquettes, mes magnifiques, mes ingénues, mes facétieuses, mes grandes randonneuses...". L'écriture rend toute l'innocence et la candeur de deux petites filles mais aussi le courage des deux parents. D'autre part, c'est l'amour qui unit les parents qui est aussi le sujet du livre. Ils ont fait le choix de vivre et restent unis. Tout est difficile, mais on a vraiment l'impression que leur choix fait, ils trouvent leur force dans leurs filles.
L'auteur tisse un lien avec ses filles en racontant chaque jour ou preque sa vie et ce qui l'unit encore à ses filles dans la vie quotidienne : les souvenirs, les objets, les photographies,les conversations, les soutiens, les maladresses, les déchirements liés à l'oubli... Mais le lecteur aussi tisse un lien dans ce livre avec ces deux filles qui nous sont racontées, elles vivent à travers ce récit.
C'est un témoignage poignant, mais on y trouve paradoxalement une force incroyable. Je ne dirai pas qu'on le lit un mouchoir à la main, d'ailleurs après avoir terminée ma lecture, je me demande si le mot deuil apparaît même une seule fois. Il ne s'agit pas d'oublier, ce livre n'est pas fataliste, il transcrit juste ce qui est et au contraire il se dégage une force, une énergie vitale.
Un très beau témoignage, plein de poésie, plein d'espoir aussi.